La BCE poursuit sa veille économique rigoureuse
À l’issue de sa réunion de politique monétaire, la Banque centrale européenne (BCE) a choisi de ne rien modifier à sa stratégie. Portée par une croissance plus robuste que prévu et une inflation convergeant vers son objectif de 2 %, l’institution de Francfort affiche un certain confort, tout en rappelant qu’elle reste attentive aux nombreux risques qui planent sur l’économie de la zone euro.
Une économie plus robuste, mais sous surveillance
La décision de statu quo de la BCE n’a surpris personne. Après plusieurs mois de ralentissement redouté, la zone euro fait preuve d’une résilience inattendue. La croissance s’est révélée plus vigoureuse que les prévisions initiales, portée par une demande intérieure relativement solide et par un marché de l’emploi en excellente santé. Le chômage se maintient à des niveaux historiquement bas, confirmant le rôle stabilisateur de la politique monétaire mise en place depuis 2024.
Côté inflation, le constat est tout aussi encourageant. Les projections convergent désormais vers la cible de 2 %, l’institution allant jusqu’à évoquer la fin du processus de désinflation. Un signal qui rassure les marchés et conforte la crédibilité de la BCE après des années marquées par des pics inflationnistes liés à la crise énergétique.
Pour autant, Christine Lagarde et son Conseil des gouverneurs ne sombrent pas dans l’autosatisfaction. L’équilibre reste fragile : la dépréciation de l’euro, la dynamique salariale en hausse et les plans de relance budgétaire de certains États membres pourraient relancer des tensions sur les prix dans les prochains mois. « Les risques sur l’inflation sont plus équilibrés », a rappelé la BCE, une formule qui traduit la prudence et la volonté de ne pas désarmer trop vite.
Des incertitudes commerciales et politiques persistantes
Au-delà des chiffres macroéconomiques, plusieurs nuages continuent de planer sur l’horizon européen. Sur le front commercial, si les tensions liées aux droits de douane se sont stabilisées, les différends sur l’acier, l’aluminium ou la fiscalité numérique constituent encore des risques latents. Un regain de protectionnisme pourrait rapidement fragiliser l’équilibre actuel et peser sur la croissance.
La sphère politique demeure également un facteur d’instabilité. Les récents événements en France rappellent que les tensions sociales et budgétaires peuvent se traduire par une remontée des taux souverains, équivalant de facto à un resserrement monétaire non désiré. Dans un tel scénario, la BCE pourrait se retrouver contrainte d’adapter sa stratégie, au risque de brouiller son message de stabilité.
Malgré ces incertitudes, le sentiment dominant à Francfort est celui d’un devoir accompli. La BCE a su traverser sans encombre les turbulences des derniers trimestres, conservant une crédibilité intacte. Dans un monde où le libre-échange vacille, où la Fed voit son indépendance questionnée et où la géopolitique perturbe les équilibres économiques, la zone euro peut se targuer de disposer d’une banque centrale solide et respectée.
La BCE a choisi de maintenir le cap, consciente que sa mission est loin d’être achevée. Si la stabilité monétaire semble de retour, l’institution devra rester vigilante pour éviter que la reprise européenne ne soit compromise par les aléas commerciaux et politiques.
Source : BCE, conférence de presse du Conseil des gouverneurs, analyse de Raphaël Thuin (Tikehau Capital).